Mode d’emploi d’un échauffement vocal efficace
L’échauffement vocal est une préparation à l’acte chanté. Une erreur commune est de penser qu’on vient réchauffer les cordes vocales, la gorge ou la voix. En réalité, cet échauffement est plutôt un réveil et une conscientisation des différents étages qui conduisent au geste vocal, pour qu’ils soient prédisposés et libres pour chanter. Le but est de rendre le chant confortable, mais aussi de se préparer mentalement et physiquement. Voici donc mes meilleurs conseils pour un échauffement vocal réussi et efficace.
Un échauffement vocal réussi est un échauffement global
L’échauffement vocal n’est pas uniquement vocal. On va, en effet, venir réveiller et conscientiser toutes ces sphères :
le corps ;
la respiration ;
la phonation ;
l’articulation et la résonance ;
le mental et l’émotionnel.
L’objectif de l’échauffement vocal est de mobiliser et de stimuler tous les étages qui servent dans le geste vocal pour sentir, libérer et trouver (ou retrouver !) l’équilibre. N’oublions pas que c’est tout le corps qui chante, ou qui parle, et pas uniquement les cordes vocales.
Il est aussi important de se mettre dans un état d’esprit positif ainsi que de se rendre disponible corporellement et émotionnellement pour chanter.
En cours de chant, il faudra aussi penser à stimuler l’attention de l’élève. S’il arrive après une journée chargée, l’échauffement est un moment pour s’ancrer dans l’instant présent, et laisser le reste de côté, le temps du cours. Si tu es prof de chant ou coach vocal, tu vas donc l’aider à se libérer l’esprit, le corps et la voix.
Un bon échauffement de la voix s’adapte à un objectif
Il existe des centaines d’exercices possibles en matière d’échauffement vocal. La seule et unique règle à respecter est d’y aller par paliers, en respectant l’élève, son rythme, ses avancées, son état psychique et émotionnel. C’est la progression qui fait l’efficacité, avec une écoute attentive de l’élève, pour lui proposer des exercices qui correspondent au moment, à son état du jour, à son état vocal ou encore à son niveau de fatigue.
Un bon échauffement se construit sur-mesure. En variant les exercices d’une séance à une autre, tu éviteras l’ennui et l’habitude, tout en mobilisant la voix de différentes manières. Dans tous les cas, l’échauffement vocal doit s’effectuer sans forcer, dans un volume sonore moyen et en partant de la zone de confort du vocaliste. Ce n’est pas une performance.
L’échauffement vocal se doit aussi d’être évolutif. On part donc d’exercices simples et efficaces, dans la zone confortable du chanteur, puis on ajoute plus de complexité au fur et à mesure de l’échauffement. Il peut également être global, ou plus ciblé, en fonction des personnes et des objectifs visés. Les exercices proposés pour un conférencier seront différents de ceux proposés à un chanteur de métal ou à un chanteur de rap. Tout dépend du contexte et des contraintes liées à l’activité vocale.
Pour un concert ou une conférence, le prof de chant ou le coach vocal peut ainsi proposer un programme d’échauffement vocal spécifique, qui pourra être différent de celui pratiqué en cours. Cet échauffement pourra aussi inclure la gestion du trac, et une série d’exercices vocaux pour aider le vocaliste à se sentir prêt à performer pendant plusieurs heures sur scène.
Mon conseil avant un concert ou une prestation vocale : essaye de t’isoler dans un endroit calme pour ne pas surenchérir sur l’intensité sonore des exercices vocaux à cause d’un environnement bruyant.
Quels exercices pour s’échauffer la voix ?
Les exercices doivent être simples et efficaces : des vocalises interminables ou chanter pendant 30 min des chansons « faciles » ne sont pas des échauffements efficaces. Au contraire, ils peuvent fatiguer la voix et être contre-productifs.
Il est nécessaire de dissocier échauffement vocal, travail technique et performance. L’échauffement vocal, n’est pas un moment où l’on teste de nouvelles techniques, mais un moment où l’on se prépare. On vient vérifier que le geste vocal est cohérent, que tout le corps est disponible et actif, et parfois même se rassurer que la voix est là, avant de chanter.
Quelques exercices possibles pour s’échauffer la voix :
Commencer par réveiller le corps, avant même de produire des sons. On va pouvoir proposer des étirements corporels, un réveil musculaire, étirer la cage thoracique, sentir toutes les parties du corps depuis les pieds jusqu’au sommet du crâne, sans oublier le visage, la mâchoire, les lèvres, la langue, car tout le corps chante ! Tout cela va permettre de se recentrer, de se concentrer et de se reconnecter avec ses propres sensations. On va porter une attention particulière à soi, une présence à soi. Ce réveil corporel et proprioceptif permet aussi de se questionner sur sa posture et de sentir son ancrage.
Proposer des exercices pour se focaliser sur le souffle et le geste respiratoire. Vérifier que le système de la soufflerie est bien en place pour chanter. On peut commencer avec les consonnes constrictives sourdes (CH, F, S), en variant la durée, la pression et le débit. Souffler dans une paille, faire des trilles de lèvres et de langue, juste avec le souffle, aideront aussi à mettre en place la souplesse respiratoire.
Commencer à vocaliser avec, par exemple:
des trilles de lèvres (comme on imiterait un moteur) ;
des trilles de langue (comme le R roulé espagnol) ;
des consonnes constrictives sonores (J, V, Z) ;
du humming (des « mmm »), ou utiliser le NG ;
des « neï neï neï », pour sentir les vibrations au niveau du nez, du visage, etc ;
ou encore chanter dans une paille dans l’eau pour favoriser une vibration douce.
Varier les exercices, les syllabes et les intervalles, pour naviguer vers les différents registres de la voix, sans aller dans les zones extrêmes tant que le geste et la voix ne sont pas disposés à y aller en toute sérénité.
Faire des vocalises évolutives, en les accompagnant du piano, pour élargir le champ du chant.
En cours de chant, l’échauffement vocal est aussi un moment pour le prof ou le coach où il est important d’observer très attentivement l’élève. On repérera ainsi les blocages éventuels, pour éviter tout forçage et adapter les exercices au besoin.
Combien de temps dure un échauffement vocal ?
La durée d’un échauffement vocal dépend des besoins de chacun. Un échauffement de 15 min est souvent suffisant, mais on peut avoir besoin de 20 à 25 min dans certains cas. Acceptons que nous ne sommes pas tous égaux et que les jours ne se ressemblent pas !
Ce qui compte ce n’est pas le temps passé, mais le fait d’être à l’écoute de son corps, de ses sensations et de sa voix. Ce que je te recommande, c’est d’essayer de chanter après 15 min, d’observer comment tu te sens avec ta voix et tes perceptions, et de continuer l’échauffement si nécessaire.
Le moment de la journée peut aussi jouer. Il est intéressant de se questionner et de tester ce qui fonctionne le mieux : à quel moment de la journée suis-je le plus en forme ou le plus disponible vocalement ? Si au bout de plusieurs tentatives, tu observes que ton rythme biologique et vocal est plus efficace entre 16 h et 19 h, alors adapte tes séances vocales à cet espace temps.
En moyenne, le corps a besoin de 2 h pour pleinement se réveiller. Attendre 2 h après le réveil avant de chanter est donc idéal, mais si tu dois chanter plus tôt ou que ta voix est encore endormie, alors tu peux allonger la durée de l’échauffement (ou décaler la séance).
Quoi qu’il en soit, l’échauffement est INDISPENSABLE, et pour tous ! En voix parlée, comme en voix chantée. Pour tous les professionnels de la voix, et pas uniquement pour les chanteurs. Les enseignants sportifs, de l’éducation, les podcasteurs, les conférenciers, les journalistes, les hypnotiseurs, les avocats… Bref, pour tous ceux qui utilisent leur voix de manière intensive dans l’exercice de leur métier.
L’échauffement vocal, c’est aussi pour le prof de chant !
Les cordonniers sont les plus mal chaussés ! Tu te reconnais ? Eh oui, les profs de chant oublient souvent de faire leur propre échauffement vocal avant de donner leurs cours de chant. Comme si c’était réservé uniquement à leurs élèves. Pourtant, ils parlent et ils chantent en continu, toute la journée : pour montrer les exemples, les exercices, pour échanger… Leur voix, parlée et chantée, est mobilisée non-stop.
L’échauffement vocal est donc obligatoire pour le prof de chant qui commence sa journée. Pour respecter sa voix et se respecter SOI. Comment peut-il, sinon, montrer le bon exemple ? C’est une étape importante pour se préparer avant de donner un cours de chant :
Pour que la voix soit prête à parler, à chanter et à montrer les exercices dès le premier cours de la journée.
Pour prévenir les risques de fatigue vocale.
Parce que si on dit à ses élèves qu’il faut le faire, on le fait aussi !
Pour les profs de chant, les coachs vocaux, les élèves et tous les professionnels de la voix, l’échauffement vocal est une phase préparatoire avant l’utilisation intensive de la voix. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’il doit être global et prendre en compte tous les étages qui composent le geste vocal. Il doit être aussi pensé sur-mesure, en fonction du contexte et du vocaliste. Et surtout : il n’est pas optionnel, mais INDISPENSABLE !